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Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 5.djvu/113

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confiée à l’adroite prudence du comte Trajan ; il eut le mérite de parvenir à s’insinuer assez dans la confiance d’un prince crédule, pour pouvoir trouver l’occasion de lui plonger un poignard dans le cœur. Para fut invité par les Romains à une fête préparée avec tout le faste et toute la sensualité de l’Orient. Tandis que les convives, échauffés par le vin, s’amusaient d’une musique militaire qui faisait retentir la salle, le comte Trajan s’éloigna pour un instant ; il rentra l’épée nue à la main, et donna le signal du massacre. Un Barbare vigoureux s’élança avec fureur sur le roi d’Arménie ; quoique celui-ci défendît courageusement sa vie avec la première arme qui lui tomba sous la main, il succomba, et la table du général romain fut teinte du sang royal d’un convive et d’un allié. Telles étaient les maximes faibles et odieuses de l’administration des Romains, que, pour atteindre au but peu certain de leurs projets politiques, ils violaient inhumainement, et à la face de l’univers, les lois des nations et les droits sacrés de l’hospitalité[1].

Le Danube. Conquêtes de Hermanric.

V. Durant un intervalle de paix de trente années, les Romains fortifièrent leurs frontières, et les Goths étendirent leurs conquêtes. Les victoires du grand

  1. Voyez dans Ammien (XXX, 1) les aventures de Para. Moïse de Chorène le nomme Tiridate, et raconte une histoire longue et assez probable sur son fils Gnelus, qui, dans la suite, obtint en Arménie la faveur du peuple, et excita la jalousie du roi régnant (l. III, c. 21, etc. p. 253, etc.).