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Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 5.djvu/148

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indépendans. Les tribus de la Scythie, connues sous la dénomination moderne de hordes, semblaient présenter chacune une famille nombreuse et toujours croissante, multipliée dans le cours de plusieurs siècles. Les plus pauvres et les plus ignorans des Tartares conservent, avec un sentiment de fierté, leur généalogie comme un trésor inestimable ; et malgré la distinction de rang introduite par la possession d’une propriété plus ou moins abondante en richesses pastorales, ils se considèrent tous particulièrement et mutuellement comme les descendans du fondateur de leur tribu. La coutume qu’ils conservent encore d’adopter les plus braves de leurs prisonniers, peut justifier l’opinion de ceux qui regardent la multiplication extraordinaire de cette famille comme légale et fictive. Mais un préjugé utile, consacré par le temps et par l’opinion, produit l’effet de la vérité. Ces orgueilleux Barbares obéissent volontairement au chef de leur famille, et leur commandant ou mursa exerce, comme représentant de leur premier ancêtre, l’autorité d’un juge en temps de paix, et celle d’un général en temps de guerre. Dans les premiers temps du monde pastoral, chaque mursa, si nous pouvons nous servir ici de ce nom moderne, agissait comme chef indépendant d’une grande famille séparée des autres, et les limites des territoires particuliers se fixaient insensiblement par la supériorité de la force ou par le consentement mutuel. Mais l’influence constante des diverses causes contribua à réunir les hordes errantes en communauté nationale, sous le