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Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 5.djvu/30

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res, venant par hasard à découvrir son nom, ne violassent à son égard, sans beaucoup de scrupule, les lois de l’hospitalité. Dans un moment d’impatience et de désespoir, il s’embarqua sur un vaisseau marchand qui cinglait pour Constantinople, et forma l’audacieux projet de s’élever au rang de souverain puisqu’on ne voulait pas le laisser jouir de la paix et de la sécurité attachées à la condition de sujet. Après avoir rôdé furtivement dans les villages de la Bithynie, changeant souvent de nom, d’habits et de retraite[1], il se hasarda enfin à entrer dans la capitale, et à confier son sort et sa vie à la fidélité de deux amis, un sénateur et un eunuque, qui lui donnèrent quelques espérances fondées sur la situation des affaires publiques. Un esprit général de mécontentement s’était répandu dans la masse des citoyens. On regrettait l’intelligence et l’équité de Salluste, à qui Valens avait imprudemment ôté la préfecture de l’Orient, et l’empereur se faisait généralement mépriser par une brutalité sans vigueur, et par une faiblesse dépourvue d’humanité. Les peuples craignaient l’influence de son beau-père le patricien Pétronius, ministre avide et cruel, qui exigeait rigoureusement tous les arrérages des tri-

  1. Il prit pour retraite la maison de campagne d’Eunomius l’hérétique, dans l’absence et sans le consentement du maître, qui n’en fut pas même instruit, et qui échappa cependant avec peine à une sentence de mort. Il fut banni dans la partie la plus reculée de la Mauritanie. Philostorg., l. IX, c. 5-8 ; et Godefroy, Dissert., p. 369-378.)