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Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 5.djvu/317

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pendant trois heures, sans distinction de citoyen ou d’étranger, d’âge ou de sexe, de crime ou d’innocence. Les relations les plus modérées portent le nombre des morts à sept mille, et quelques écrivains affirment que l’on sacrifia quinze mille victimes aux mânes de Botheric. Un marchand étranger, qui probablement n’avait pris aucune part à la mort du général, offrit sa propre vie et toute sa fortune pour sauver un de ses fils ; mais tandis que ce père infortuné balançait, incapable de choisir et plus incapable de condamner l’un des deux, les Barbares terminèrent son anxiété en immolant au même instant ces deux jeunes gens sans défense. Les assassins donnaient pour excuse de leur inhumanité, un motif qui augmenterait encore, par l’idée d’un froid calcul, l’horreur de ce massacre exécuté par les ordres de Théodose : ils assuraient qu’on avait fixé le nombre de têtes que chacun d’eux devait présenter. Ce qui aggravait le crime de l’empereur, c’est qu’il avait fait souvent de longs séjours à Thessalonique. La situation de cette ville infortunée, ses rues, ses maisons, et jusqu’à l’habillement et aux traits de ses habitans, étaient familiers à Théodose, et l’existence du peuple qu’il faisait massacrer devait frapper vivement son imagination[1].

  1. Saint Ambroise (t. II, epist. 51, p. 998), saint Augustin (De civitate Dei, V, 26) et Paulin (in vit. sancti Ambrosii, c. 24), expriment en termes vagues leur horreur et leur compassion. On peut y ajouter l’autorité de Sozomène (l. VII, c. 25) ; Théodoret (l. V, c. 17) ; Théophane (Chro-