Aller au contenu

Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 5.djvu/320

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Pénitence de Théodose. A. D. 390.

Lorsque Saint Ambroise apprit le massacre de Thessalonique, son âme se remplit d’horreur et d’effroi. Il se retira à la campagne pour s’y livrer à sa douleur et éviter la présence de Théodose ; mais, songeant qu’un silence timide le rendrait comme complice du crime, il écrivit une lettre particulière à l’empereur, dans laquelle il lui en peignait l’énormité, en l’avertissant qu’il ne pourrait l’effacer que par les larmes de la pénitence. Saint Ambroise joignant la prudence à la fermeté épiscopale, au lieu d’excommunier directement l’empereur[1], se contenta de lui mander qu’il avait été averti dans une vision de ne plus présenter l’oblation de l’Église au nom et même en présence de Théodose ; il lui conseillait de s’en tenir aux exercices de la prière, et de ne point penser à s’approcher des autels pour recevoir la sainte eucharistie avec des mains impures, encore teintes du sang d’un peuple innocent. L’empereur, profondément affecté des reproches de l’archevêque et déchiré de ses propres remords, après avoir pleuré quelque temps les suites funestes de son aveugle fureur, se disposa, comme de coutume, à faire ses dévotions dans la cathédrale de Milan.

  1. Saint Ambroise, t. II, epist. 51, p. 997-1001. Son épître est une mauvaise rapsodie sur un sujet qui méritait d’être traité plus dignement. Saint Ambroise savait mieux agir qu’écrire ; ses compositions manquent de goût et de génie. Il n’a ni le feu de Tertullien, ni l’élégante abondance de Lactance, ni la vivacité spirituelle de saint Jérôme, ni la grave énergie de saint Augustin.