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Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 5.djvu/43

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[1]. Valens avait pour premier principe d’administration de tout sacrifier au soin de sa sûreté personnelle. Confondu parmi les sujets, il eût baisé en tremblant la main d’un oppresseur. Placé sur le trône, il dut penser que les mêmes craintes qui eussent subjugué son âme étaient propres à lui assurer la patiente soumission de son peuple. Les favoris de Valens obtenaient, par ce qu’il leur permettait de rapines et de confiscations, des richesses que leur aurait refusées son économie[2]. Ils employaient leur éloquence à lui persuader que dans les cas de crime et de lèse-majesté, les soupçons équivalaient à une preuve, que la faculté de se rendre criminel en supposait l’intention, que l’intention était aussi punissable que l’action, et que tout citoyen méritait la mort dès que sa vie menaçait la sûreté ou troublait le repos de son souverain. On trompait souvent Valentinien, on abusait de sa confiance ; mais le sourire du mépris aurait

    homme l’aurait fait, d’une manière honorable. Le même historien ajoute que sa colère n’était point dangereuse ; mais Ammien observe, avec plus de bonne foi et de jugement, incidentia crimina ad contemptam vel læsam principis amplitudinem trahens, in sanguinem sæviebat.

  1. Cum esset ad acerbitatem naturæ calore propensior… Pœnas per ignes augebat et gladios. (Ammien, XXX, 8 ; XXVII, 7.)
  2. J’ai rejeté sur les ministres de Valens le reproche d’avarice qu’on lui fait personnellement ; cette passion semble plus naturelle aux ministres qu’aux souverains, en qui l’avarice doit s’éteindre par la possession de tout.