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Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 7.djvu/139

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heurs, a eu beaucoup d’adversaires politiques et à peine un ennemi personnel ; qui a conservé hors de place un grand nombre d’amis fidèles et désintéressés, et qui, au milieu des infirmités[1], n’a rien perdu de la vigueur et des charmes de son esprit, ni de l’heureuse tranquillité de son incomparable caractère. Lord North doit me permettre de parler ainsi le langage de l’amitié et de la vérité ; car j’imposerais silence à la vérité et à l’amitié, s’il dispensait encore les grâces de la couronne.

La vanité, se glissant au fond de ma solitude, me persuadera peut-être que mes lecteurs désirent savoir si en terminant mon ouvrage j’ai prétendu leur dire adieu pour toujours. Je vais leur apprendre tout ce que j’en sais, et tout ce que je pourrais répondre à mon plus intime ami. Les raisons de me taire et de parler encore sont actuellement à peu près en équilibre ; et après avoir examiné mes dispositions les plus secrètes, j’ignore de quel côté penchera la balance. Je ne puis me dissimuler que six gros in-4o ont assez éprouvé et peut-être lassé l’indulgence du public ; qu’un auteur heureux a plus à perdre qu’à gagner en suivant la même carrière ; que maintenant je n’ai plus qu’à descendre dans le chemin de la vie, et que les plus estimables de mes compatriotes, les hommes que j’ambitionne d’imiter, ont abandonné les pinceaux de l’histoire vers l’âge où je me trouve. Je considère toutefois que les annales des temps anciens et des temps modernes offrent de riches et intéressans sujets ; que j’ai encore de la santé et du loisir ; que l’habitude d’écrire a pu me donner de la facilité et une

  1. Lord North est presque aveugle.