Aller au contenu

Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 7.djvu/438

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

réparée par sa générosité : chaque action de valeur était récompensée par le riche et honorable don d’un bracelet ou d’un collier, rendu plus précieux par l’estime de Bélisaire, dont il était la preuve. Il jouissait de l’amour des cultivateurs, qui, à l’ombre de ses drapeaux, vivaient dans la tranquillité et l’abondance. La marche des armées romaines enrichissait un pays au lieu de l’appauvrir ; et telle était la discipline rigoureuse de son camp, qu’on ne dérobait pas une pomme de dessus l’arbre, et qu’on n’aurait pu découvrir un sentier formé dans un champ de blé. Bélisaire était chaste et sobre ; au milieu de la licence de la vie militaire, personne ne pouvait se vanter de l’avoir vu pris de vin : on lui offrit les plus belles captives de la race des Goths ou de celle des Vandales ; mais il détourna ses regards de leurs charmes, et on ne soupçonna jamais le mari d’Antonina d’avoir manqué à la foi conjugale. Le témoin et l’historien de ses exploits observe qu’au milieu des périls de la guerre, il avait de l’audace sans témérité, et de la lenteur ou de l’impétuosité, selon les besoins du moment ; qu’au dernier terme de la détresse, il savait conserver ou feindre l’espérance, et que dans la fortune la plus prospère, on le voyait simple et modeste. Il égala ou surpassa les anciens maîtres de l’art militaire : la victoire suivit ses armes sur terre et sur mer. Il subjugua l’Afrique, l’Italie et les îles adjacentes ; il conduisit captifs aux pieds de Justinien les successeurs de Genseric et de Théodoric ; il remplit Constantinople des dépouilles de leurs palais, et