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Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 7.djvu/90

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qui possédaient encore les côtes de l’Océan et de la Méditerranée, encourageaient secrètement les peuples à secouer le joug des Barbares, et à soutenir la dignité du nom romain. La fidélité de sujets suspects n’est sans doute jamais mieux assurée, que quand ils craignent de perdre dans une révolte plus qu’ils ne peuvent gagner par une révolution ; mais il a toujours paru si naturel d’opprimer ceux qu’on hait ou que l’on redoute, que la maxime contraire doit obtenir le titre de sagesse et de modération[1].

Révolution de la Bretagne.

Tandis que les Francs et les Visigoths assuraient leurs établissemens de la Gaule et de l’Espagne, les Saxons achevèrent la conquête de la Bretagne, la troisième grande division de la préfecture de l’Occident. Comme elle était séparée depuis long-temps de l’Empire romain, je pourrais négliger sans scrupule une histoire connue du moins instruit comme du plus savant de mes compatriotes. Les Saxons, habiles à ramer et à combattre, ignoraient l’art qui pouvait seul transmettre leurs exploits à la postérité. Les anciens habitans, retombés dans la barbarie, ne pensèrent point à décrire la révolution qui les y avait replongés, et leurs douteuses traditions étaient pres-

  1. Dom Bouquet a publié, t. IV, p. 278-460, le Code correct des Visigoths, divisé en douze livres. Le président de Montesquieu (Esprit des Lois, l. XXVIII, c. 1) l’a traité avec une sévérité excessive. Le style m’en déplaît, et je hais l’esprit de superstition qui s’y montre ; mais je ne crains point de dire que cette jurisprudence civile annonce l’état d’une société plus policée et plus éclairée que celle des Bourguignons ou même des Lombards.