Page:Gide - Dostoïevsky, 1923.djvu/80

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tion, et la maladie n’avait fait, là-bas, qu’empirer. « Un teint maladif » : Dostoïevsky a toujours été de mauvaise santé. Pourtant c’est lui, le dolent, le faible, qui est pris pour le service militaire, tandis que son frère, très robuste au contraire, est dispensé.

En 1841, c’est-à-dire à l’âge de vingt ans, il est nommé sous-officier. Il prépare alors des examens pour obtenir, en 1843, le grade d’officier supérieur. Nous savons que son traitement était de 3 000 roubles, et bien qu’il fût entré en possession de l’héritage de son père à la mort de celui-ci, comme il menait une vie très libre et que de plus il avait dû prendre à sa charge son plus jeune frère, il s’endettait sans cesse. Cette question d’argent reparaît dans toutes les pages de sa correspondance, bien plus pressante encore que dans celle de Balzac ; elle joue un rôle extrêmement important jusque vers la fin de sa vie, et ce ne fut que dans ces dernières années qu’il sortit vraiment de la gêne.

Dostoïesky mène d’abord une vie dissipée. Il court les théâtres, les concerts, les ballets. El est insouciant. Il lui arrive de louer un appartement, parce que, simplement, la tête du logeur lui plaît. Son domestique le vole ; il s’amuse à se laisser voler. Il a de brusques sautes d’humeur, suivant la bonne ou la mauvaise fortune. Devant son incapacité à se diriger dans la vie, sa famille et ses amis souhaitent de le voir loger avec son ami Riesenkampf. « Prends en exemple le bel ordre