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ISABELLE

Comme un chien affamé se jette sur un os, Isabelle s’en saisit.

— Partez, à présent : nous n’avons plus rien à nous dire, et je ne vous reconnais plus.

Puis ayant été prendre un éteignoir sur la table de nuit, elle en coiffa successivement chaque bougie du candélabre, et partit.

La pièce à présent paraissait sombre. Isabelle cependant s’était relevée ; elle passait ses doigts sur ses tempes, rejetait en arrière ses boucles éparses et rajustait son chapeau. D’une secousse elle remonta son manteau qui avait un peu glissé de ses épaules, et se pencha vers Madame Floche pour lui dire adieu. Il me parut que la pauvre femme cherchait à lui parler, mais c’était d’une voix si faible que je ne pus rien distinguer. Isabelle sans rien dire pressa une des tremblantes mains de la vieille contre ses lèvres. Un instant après je m’élançais à sa poursuite dans le couloir.