Page:Gide - Les Nourritures terrestres.djvu/128

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à mon quatrième verre, je commençai de ressentir cette légère ivresse qui, rapprochant tous les objets les mettait à portée de ma prise ;
au cinquième, la salle où j’étais, le monde, me sembla prendre enfin des proportions plus sublimes, où mon sublime esprit, plus librement, évoluait ;
au sixième verre, en étant un peu fatigué, je m’endormis.

(Toutes les joies de nos sens ont été imparfaites comme des mensonges.)

Auberges.

J’ai connu le vin lourd des auberges, qui revient avec un goût de violette, et procure le sommeil de midi ; j’ai connu l’ivresse du soir, quand il semble que toute terre vacille sous le seul poids de votre puissante pensée. —

Nathanaël, je te parlerai de l’ivresse. — Nathanaël, souvent le plus simple assouvissement me fut une ivresse, tant, avant, j’étais ivre déjà de désirs. Et ce que je cherchais sur les routes, ce