Page:Gide - Souvenirs de la Cour d’assises.djvu/22

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ou qu’ils en commettront ; que, donc, ils sont bons à coffrer.

Cependant c’est pour ce vol uniquement que nous pouvons les condamner.

— Comment aurais-je pu le commettre ? dit Arthur, je n’étais pas au Havre ce jour-là.

Mais on a recueilli, dans la chambre de sa maîtresse les morceaux d’une carte postale de son écriture, qui porte le timbre du Havre du 30 octobre, jour où le vol a été commis.

Or voici comment se défend Arthur :

— J’ai, dit-il en substance, envoyé ce jour-là à ma maîtresse non pas une carte, mais deux ; et comme les photographies qu’elles portaient étaient “ un peu lestes ” (elles représentaient en fait l’Adam et l’Eve de la cathédrale de Rouen), je les avais glissées, image contre image, dans une seule enveloppe transparente, après y avoir mis double adresse, les avoir affranchies toutes les deux et avoir percé l’enveloppe aux endroits des timbres, pour en permettre la double oblitération. Au départ, un seul des timbres aura sans doute été oblitéré. A l’arrivée au Havre l’employé de la poste a oblitéré l’autre ; c’est ainsi qu’il porte la marque du Havre.

C’est du moins ce que j’arrivais à démêler au travers de ses protestations confuses, bousculées par un Président dont l’opinion est formée et qui paraît bien décidé à ne rien écouter de neuf. J’ai le plus grand mal à comprendre, à entendre même ce que dit Arthur, sans cesse inter-