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VIII

Considérée d’abord comme un simple délit, l’affaire que nous eûmes à juger ce jour-là, avait déjà passé devant le tribunal correctionnel du Havre ; l’un des accusés, protestant contre sa condamnation à deux ans, fit appel. C’est Yves Cordier, cordonnier ; il comparaît en compagnie de C. Lepic et de Henri Goret, ses complices ; des deux filles Mélanie et Gabrielle. Ils sont accusés tous les cinq d’avoir entraîné le marin Braz, après l’avoir soûlé, de l’avoir “ passé à tabac” et dépouillé de l’argent qu’il portait sur lui. Ce marin, reparti en voyage, n’a pu répondre à la citation, non plus qu’il n’avait pu comparaître, lorsque l’affaire était passée en correctionnelle. Il avait déposé sa plainte sitôt après l’agression ; puis, ayant recouvré son argent, l’avait retirée peu de jours après, avant de se rembarquera nouveau. Si l’affaire suivait son cours c’était, à proprement parler, malgré lui.

Cordier est un grand gars de dix-huit ans, un peu