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Ce qui demeure


 
Vers accompagnant l’envoi d’un portrait.



Voilà votre portrait. C’est votre grâce altière,
C’est votre beauté grecque, en la pâle lumière
Filtrée à travers l’or d’un vieux vitrail flamand ;
De longs et chauds rayons caressent doucement
Votre lèvre entr’ouverte où flotte la parole,
Et font de vos cheveux une blonde auréole ;
L’étincelle amoureuse illumine vos yeux,
Vos yeux doux et troublants, vos yeux mystérieux
Dont le regard se perd dans l’infini du rêve.

Hélas ! pourquoi faut-il qu’un vent fatal enlève
Sur les fronts adorés la splendeur des vingt ans,
Et qu’un simple portrait résiste plus longtemps
Que la forme vivante à l’affront des années ?

Si vous les regrettez vos splendeurs profanées,
Comme aux beaux jours d’antan vous pourrez les revoir
Sur votre vieux portrait, ainsi qu’en un miroir,
Quand la griffe de l’âge aura creusé vos rides.

Et quand viendra la nuit dans vos orbites vides,
Triomphant du suprême outrage de la Mort,
Par votre vieux portrait vous serez belle encor.