Page:Ginguené - Lettres sur les Confessions de J. J. Rousseau, 1791.djvu/24

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s’eſt aſſez vengé, quand on l’a fait connoître ; & que l’auteur d’un ouvrage tel que les Confeſſions eſt trop heureux de trouver ſous ſa plume, pour égayer le lecteur.

Quant à ceux qu’il regarda comme ſes véritables ennemis, comme joignant au malin vouloir le talent & le pouvoir de nuire, ce n’eſt pas encore ici le lieu de décider s’ils étoient tels en effet ; mais ſi, les jugeant ainſi, & ayant de ſi fortes raiſons pour le croire, il a dû parler d’eux comme il a fait. Et qui peut douter qu’il n’en ait eu le droit ? Qui pourroit, qui voudroit enlever cette reſſource à l’infortune ? Quoi ! on l’aura perſécuté, noirci, diffamé pendant ſa vie ; & il ne pourra révéler les complots de ceux dont il fut la victime ! Et de quoi ont à ſe plaindre ceux qui le haïſſoient, s’il n’a fait que raconter la ſource & les effets de leur haine ?

Mais preſque tous ont été ſes amis, ſes protecteurs, ſes bienfaiteurs… J’entends : il ſuffira de faire ſonner bien haut de prétendus bienfaits, qui ont eu pour but de tyranniſer, non de ſervir ; & qui ne pouvant avoir, pour l’homme délicat qui reçoit, d’autre prix que l’amitié de celui qui donne ou qui oblige, n’en ont plus, ne l’enchaînent plus, quand cette amitié s’éteint, ou ſe change en haine : il ſuffira d’uſurper le titre ſacré d’ami, & d’en exiger les ſentimens ſans les