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PINDARE

bien que nous poursuivions jour et nuit une course dont le destin a caché le but à notre ignorance[1]. »

Voilà, en quelques traits, la grandeur et la misère de l’homme ; voilà l’ébauche d’une explication de la destinée humaine : Pindare la complétera ailleurs ; il ira même jusqu’à suivre l’homme au delà du tombeau dans les vicissitudes qu’il lui ménage avec les pythagoriciens, parce qu’il a foi dans la noblesse native et dans les droits de la nature humaine. M. Croiset remarque que la vie future tient peu de place chez lui : il y aurait plutôt lieu de s’étonner qu’elle en tienne une, tant un pareil sujet semble répugner au caractère d’une ode triomphale. Qu’on relève, si l’on veut, quelques différences de détail entre la IIe Olympique et d’intéressants fragments de chants funèbres ; qu’on remarque que l’expression varie, qu’elle est plus ou moins mystique, qu’elle se rapproche plus de la doctrine d’Éleusis ou de celle de Pythagore, suivant qu’il s’agit d’un Athénien ou d’un habitant de la Sicile, et qu’on en infère que le poète ne s’asservit à aucune croyance : il ne faut pas dire pour cela que c’est pour lui affaire de curiosité et de composition poétique, « qu’il aime à traverser d’un rapide essor les plus beaux systèmes de son temps et à rapporter de ses explorations quelques nobles idées qui ser-

  1. Nem., vi, v. 1 et suiv.