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LA PASTORALE DANS THÉOCRITE

joute poétique. Elle s’engage aussitôt qu’ils ont trouvé un juge, le bûcheron Morson, qui ramassait des bruyères dans le voisinage. C’est cette joute poétique qui rappelle plus directement la forme première du bucoliasme. Les deux adversaires luttent, pour ainsi dire, à coups de distiques, dont chacun est un petit développement sur une seule idée. Voici qu’elle paraît être la loi de ces sortes de combat. Un des deux chanteurs, désigné par le sort ou par une convention, commence, et cet ordre reste établi pour toute la lutte. Il débite des vers (ici il n’y en a que deux) sur le sujet qu’il lui plaît de choisir ; l’autre est tenu de répliquer aussitôt par le même nombre de vers, du même tour et dans le même ordre d’idées, et de rendre, par les analogies, les correspondances et les contrastes, au moins l’équivalent de ce qu’il vient d’entendre. Ils continuent jusqu’à ce que l’un d’eux renonce, ou que le juge, suffisamment éclairé, leur impose silence. Tantôt celui qui conduit la lutte reste dans des sujets voisins, tantôt il change brusquement de sujet et de ton. Le mieux est d’y mettre une grande variété. Ainsi, dans la ve idylle, la mention d’amours rustiques, ou réels ou de fantaisie, des échanges d’invectives et de proverbes caustiques, des souhaits de l’âge d’or appliqués au Crathis, le fleuve du pays, et à la fontaine de Sybaris, des admonestations aux mou-