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Page:Girard - Contes de chez nous, 1912.djvu/66

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tourments dont il ne connaissait que trop la nature, une immense pitié pour le captif naquit dans son cœur.

Pour ne plus voir des yeux et des traits qui le poursuivaient comme une obsession vengeresse, il détourna la tête.

— Guerriers, s’écrie tout à coup Aontarisati, dont la voix éclate comme la foudre, ces prisonniers sont à moi, je les ai payés au prix de ma fille unique.

Ces deux visages-pâles, je vous les donne, ils sont les prisonniers de la nation.

Je vous les livre. Faites-en vos délices jusqu’aux premiers feux de l’aurore. Que le jeune Agniehronnon, qui n’a pas encore bandé l’arc ni fait chanter ou pleurer le prisonnier, s’exerce sur ces captifs.

Demain, quand le soleil éclairera l’entrée de nos wigwams, on attachera les visages-pâles à ces poteaux pour y être brûlés. J’ai dit.

À ces paroles, Andioura, qui ne connaît pas la peur, frissonne de tous ses membres.

Il sait d’avance les atrocités auxquelles vont être sujets les captifs durant cette nuit infernale. Dissimulant alors les vifs sentiments qui se combattent dans son âme et bouleversent ses esprits, il ouvre la bouche :

— L’illustre sagamo, dit-il, pour qui j’ai tant d’admiration et de reconnaissance, écoutera-t-il un conseil de son fidèle guerrier ?

Nous voulons savoir si, comme les Agniehronnons, les visages-pâles peuvent entonner, le sourire aux lèvres, leur chant de mort au milieu du supplice, ou bien s’ils