Page:Girard - Florence, 1900.djvu/115

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
105
FLORENCE

— Enfin, le moment est venu d’agir. Dieu veuille que je sois utile à quelque chose. Mieux vaut une mort glorieuse qu’une vie oisive aux côtés de la fille d’un traître.

« Adieu, Florence ! Je te reverrai au ciel. Si je meurs, c’est que je n’aurai pas voulu sacrifier l’amour de la patrie à l’amour d’une femme

« S’il est écrit que je dois mourir aujourd’hui, au moins j’aurai la consolation de terminer mes jours comme un homme et non comme une vieille nonagénaire au milieu de son lit.

« Et pourquoi regretterais-je la vie ?

« Ma mère ?

« Dieu y pourvoira. Lui qui ne laisse pas les petits oiseaux sans pâture, lui qui fait vivre l’humble brin d’herbe, reposera sur elle son œil bienveillant.

« Florence ?

« Ah oui ! Florence : j’aurais été bien heureux avec elle, trop heureux ! Dieu ne l’a pas voulu, que sa volonté soit faite et non la mienne !

« Ah ! poètes, pourquoi avoir tant et si bien écrit pour nous faire regretter la vie ? La vie, théâtre d’opéra-bouffe où l’on joue son petit rôle avec plus ou moins de succès et où l’on ne se montre réellement soi que dans les coulisses ! Trône ridicule où l’on nous proclame roi, où l’on nous donne de grands coups d’encensoir jusqu’à ce que l’on soit à demi suffoqué par cette opaque fumée d’encens !

« À peine avons-nous le dos tourné, on s’amuse de nous à gogo, on nous déchire à belles dents. Rien de plus commun que les protestations d’amour, d’amitié ; rien de plus rare que l’amour, l’amitié. Le pauvre