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FLORENCE

du reste. Viens m’embrasser, ma chérie. Un autre… un autre… encore un autre !

Le notaire prend son castor, qui a l’air d’un chat qu’on sort de l’eau, sa grosse canne, un vrai gourdin de meurtrier, et sort en geignant contre ses rhumatismes.

Florence demeure seule avec ses pensées.

Elle se réfugie dans son boudoir, moelleux berceau de bergeronnette plein d’un exquis parfum de bien-être. Retraite où l’homme ne pénètre qu’avec une certaine curiosité et un certain respect, comme l’idolâtre qui franchit le seuil du temple de ses déesses rempli de mystères.

La jeune fille se laisse tomber dans un fauteuil capitonné de velours olive. Ses pieds reposent tout près de l’âtre. Les flammes d’une grosse bûche pétillent joyeusement, car le vent se fait froid au dehors. Elle cache son menton dans sa menotte. Les yeux dans le vide, elle se laisse bercer par ses rêves.

Il y a trois mois à peine, elle était sur les bancs nus du couvent, sous la plus stricte surveillance, renfermée, cloîtrée pour ainsi dire, entre quatre murs tristes et menaçants comme des chiens de garde.

Seul, le spectacle du dévouement et de la foi se présentait à ses regards.

Maintenant, voilà que tout à coup, comme au contact de la baguette enchantée d’une fée, tout change. L’enfant se voit libre. Libre au sein de ce monde tant béni par ceux-ci, tant maudit par ceux-là. Où il faut parfois, le cœur rongé par un serpent au dard aigu et cruel, présenter un visage riant et content. Il faut