Page:Girardin - La Canne de M. de Balzac.djvu/178

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affranchie par la trahison. — Ô misère ! ses devoirs ont changé de maître ; sa fidélité est à celui qu’elle aime ; l’homme qu’elle n’aime pas est son ennemi.

M. Thélissier était loin de deviner ce qui se passait dans l’âme de sa femme ; il la croyait incapable d’éprouver la moindre passion. Il avait épousé Malvina si jeune qu’il la traitait toujours comme une enfant. Les gens qui nous ont vus naître ne nous connaissent jamais ; ils ne veulent pas comprendre que l’on grandisse, ils nous regardent toujours avec leurs préventions ; et, dans leur étonnement stupide, ils appellent « étrange changement de caractère » les développements naturels que l’âge amène dans nos idées, dans nos défauts et dans nos sentiments. — On ne peut pas imaginer qu’une femme qu’on a vue jouer à la poupée à l’âge de six ans, puisse mourir d’un chagrin d’amour à vingt-cinq ans, et pourtant cela s’est vu.

M. Thélissier, d’ailleurs ne comprenait rien aux délicatesses, disons mieux, aux corruptions du cœur ; c’était ce qu’on appelle un bon mari, facile à vivre, généreux ; mais professant