Page:Giraudoux - Adorable Clio.djvu/152

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d’une ville où il ne pleut pas, ou du centre d’un château… Injuste, — depuis 1870 — la défense de boucher nos canons de fusil pour leur éviter la rouille. Injuste ce gros obus qui nous escorte à l’aveugle, semant des monticules le long de notre chemin, comme une taupe obstinée de la terre à nous poursuivre. Injuste de voir marcher du même pas, tous transigeant, ceux qui dans la vie allaient vite et ceux qui allaient doucement, de voir des êtres barbus et rouges, dans la paix rasés et pâles, renoncer aujourd’hui à leurs manies, leurs entêtements, abandonner leur vrai squelette. Le braconnier d’eau qui toujours s’amusait à traverser à gué les ruisseaux, prend le pont. Le cœur se fond de cette injustice. Le siffleur de music-hall ne siffle plus. Artaud qui prétendait hier ne devoir obéissance qu’au colonel et refusait de rentrer dans le rang — le colonel, par hasard, passait, il avait obéi aussitôt — obéit à un premier soldat. Tous, ils sont, injustice, comme si le premier