Page:Giraudoux - Adorable Clio.djvu/166

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Il soupire… Dès qu’il dort il voit, m’a-t-il dit, l’entrée d’un immense tunnel et des ingénieurs, des contremaîtres agiter leurs lanternes et leurs casquettes… Mais il ne sait si le train va y pénétrer ou en sortir… Que j’aime cette heure du jour !… Que je l’aime à Néris quand je sors acheter les journaux, les souliers de mon étage une fois cirés, et je croise les filles de la Pastillerie, qui s’en vont par deux, tirant le haut de leurs bas à travers leur tablier. D’ailleurs j’aime aussi la nuit, et midi, et le soir. Je suis bien connu à Néris pour cela : j’aime tout. — Voici ce que je ne peux voir sans m’accouder, sans poser ma tête dans mes mains et la soulever comme un présent, voici l’aube. La nuit se décolle de la terre, avec peine, comme un remède que l’on arrache, comme un tapsia d’une chair malade. Les branches des sapins remuent doucement, de bas en haut, et c’est de la terre que monte un souffle vertical. Un nuage gris efface où il passe les étoiles, un nuage