Page:Giraudoux - Adorable Clio.djvu/222

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

France, à cette distance, se simplifiait. Mais, soudain, la même main criminelle allumait à la fois, chacun sur un continent, l’aurore, l’aube et, du côté de l’Arménie, le petit jour. Les étoiles tombaient. Deux oliviers d’argent, vieille habitude des cinémas, agitaient entre les lignes les débris d’un feuillage immortel. Alors le soleil se levait.

Il se levait au-dessous même de nous, sous notre képi, sous notre sac et je savais désormais ce qu’eût fait chacun de mes hommes s’il avait reçu en cadeau le soleil même. Baltesse le pétrissait, le roulait dans ses mains ; Riotard le posait sur sa tête, l’équilibrait, le reprenant quand il rebondissait. Soleil carmin, sur lequel tout prenait feu et auquel se piquaient nos regards devenus rayons tout à coup… Nous les y laissions. Séduite par nos armes, par nos gamelles, une alouette planait sur la tranchée, en suivait chaque retrait, chaque saillant ; il n’y avait, du poste turc, qu’à dessiner son vol pour connaître notre abri et