Page:Giraudoux - L’École des indifférents.djvu/17

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’averse la moins drue le met en déroute, l’arrête pour des heures sous un porche. Souvent au contraire sa paresse, son insuffisance, s’étalent aimablement sur tout son être. D’autres jours, son visage se ride, ses joues défaillent, il semble qu’on doive alors le consoler de la première chose venue, d’avoir manqué sa vie, de n’être point César, de ne point aimer les babas. Mais lui continue à se promener lentement et sans arrêt dans cette foule qui travaille et lui fait honte, comme les poules sous la pluie qu’elles sentent définitive,

Le voilà qui joue avec des enfants. Debout au milieu d'un cerceau tombé, il feint de ne pouvoir sortir du cercle. Seule une petite fille peut l’en tirer. Elle s'attarde à l’admirer, ses petites amies la rejoignent ; elles nous provoquent, sans qu'on les rappelle : les mères laissent leurs enfants s’approcher de l'inconnu, jouer avec lui, de même qu’elles leur permettent d’avancer jusqu'aux genoux dans l’Océan. Nous revenons à regret. Il n’est pas tard, mais je dîne en ville. Etienne se tait, il est triste, — tristesse légère sans doute, mais