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PRÉFACE VII

exactement? A l'usage, j'ai toujours vu que derrière des promesses d'amusement on cachait d'insipides corvées. Dieu vous préserve des journaux amusants, des petits jeux amusants, et en général de toutes les journées d'amusement ! J'aime mieux un large et reposant ennui.

Pour moi, un récit romanesque, un roman, c'est l'impression reçue par une conscience, par une imagi- nation, par un être humain, et que celui-ci me com- munique; c'est une âme qui pense, qui me donne l'émotion, le sentiment qu'elle a reçu d'un fait. Il s'agit que vous ayez une émotion, et puis de me la faire ressentir; il s'agit de me mettre dans la disposi- tion où vous êtes vous-même, de me faire participer de votre âme, de votre état de génie, oui, de me faire partager votre génie. Prenez le moyen que vous vou- drez, il faut vous emparer de mon cœur ou de mon imagination pour les hausser jusqu'où vous êtes capa- bles d'aller.

Il y a mille sortes de romans : les uns nous peignent les mœurs d'une société ou bien quelque type d'excep- tion; d'autres nous mettent au courant d'une doc- trine; d'autres encore nous enflamment d'amour ou de haine pour un idéal. Toutes les natures d'esprit, toutes les ambitions d'écrivains ont trouvé dans le roman un incomparable moyen d'expression. Pour moi, je lui demande de ne pas se faire avec ma seule raison, mais d'être l'étincelle qui jaillit au contact de ma sen- sibihté profonde et de mon expérience la plus clair- voyante. Je ne su^s satisfait qu'autant qu'une pensée que j'ai contrôlée, que je vois être une vérité, se mue