Page:Glatigny - Œuvres, Lemerre.djvu/278

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À nos pieds, comme pour railler, les soldats
Chantaient, et l’on voyait des feux dans la caserne,
Puis, tout au fond,— car l’œil, même la nuit, discerne
Ce dont il a besoin de se repaître, afin
Que le cœur furieux ait toujours soif et faim
De vengeance, — on voyait la chose où la tuerie
S’était faite, lugubre à voir, mal équarrie
Et semblant demander à boire encore du sang.
« Cela se passera donc ainsi, Dieu puissant !
Cria Gallochio. Les meilleurs, les plus braves,
Ceux qui sont faits pour vivre et mourir sans entraves
Seront saignés au cou sans que nous disions rien !
Oh ! non ! »
Je répondis :
« Mon frère, écoute bien :
Les juges sont gardés et leur maison est close ;
Un juré c’est un lâche. Entre eux tous, lequel ose
S’aventurer le soir dans la campagne ? Mais
Notre parent sera vengé, je le promets,
Et d’autres avec lui, d’une manière telle
Que tous en garderont une pâleur mortelle.
Allez m’attendre tous près de Biguglia.
Vous savez si celui qui vous parle oublia
Jamais d’être fidèle à la parole dite.
Allez ! Laissez-moi faire. À la place maudite
Où mourut Pierre Antoine on nous retrouvera :
Elle veut boire encore du sang, elle en boira ! »
Je restai seul. J’avais mon plan. C’était folie
Que d’aller s’attaquer à toute cette lie