Page:Godwin - Caleb Williams, II (trad. Pichot).djvu/178

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Je repris tranquillement mes pièces de vers et les remis sur ma table. Après les avoir revues, j’en corrigeai et recopiai une que je joignis avec deux autres, pour faire offrir le tout à l’éditeur d’un recueil périodique. Celui-ci demanda qu’on les lui laissât pendant deux jours. Au jour convenu il fit réponse à mon amie qu’il insérerait mes vers dans sa prochaine livraison. Mrs. Marney lui ayant fait quelque question sur le prix, il répliqua que sa règle constante était de ne rien donner pour les ouvrages en vers, qu’il trouvait journellement sa boîte pleine de ces sortes de productions ; mais que, si l’auteur voulait essayer son talent en prose, par quelque morceau de littérature ou quelque nouvelle, il verrait ce qu’il pourrait faire pour lui.

Je me soumis sur-le-champ à cette réquisition de mon dictateur littéraire. Je me mis à composer un morceau dans le genre du Spectateur d’Adisson, et il fut accepté. Au bout de peu de temps, je me trouvai en relation tout à fait suivie avec le Magazine. Toutefois je me défiai de l’abondance de mes ressources en dissertations morales, et mes pensées se tournèrent bientôt vers le conte, qui était l’autre genre de production que m’avait suggéré mon directeur. Pour suffire à ses demandes qui se multipliaient de plus en plus et pour faciliter mon travail, j’employai la ressource des traductions. Je n’avais guère la facilité de me procurer des livres, mais, comme j’avais la mémoire excellente et bien fournie, il m’arrivait souvent de traduire ou d’imiter des fictions que j’avais lues quelques années aupa-