Page:Godwin - Caleb Williams, II (trad. Pichot).djvu/41

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pourquoi soumettre mon bonheur à l’arbitrage des autres ? Mais quand même une bonne réputation serait un bien de la plus haute valeur, un pareil moyen de la recouvrer ne serait-il pas réprouvé par le sens commun ? Le langage que ces institutions tiennent à l’infortuné qui les invoque n’est-il pas celui-ci : « Allons, sois privé de la lumière du jour, associe-toi à ceux que la société a marqués comme les objets de son exécration ; rends-toi l’esclave des geôliers ; laisse-toi charger de chaînes ; tu pourras ensuite espérer d’être purgé d’une injuste accusation, et de recouvrer l’honneur et la réputation ? » Tels sont donc les moyens de consolation qu’offre la loi à ceux que la méchanceté ou la sottise, une inimitié privée ou une assertion indiscrète font gémir, sans le plus léger fondement, sous le poids de la calomnie ! Pour mon compte, j’étais bien certain de mon innocence, et l’examen m’a bientôt fait voir que les trois quarts de ceux qui sont habituellement assujettis à un traitement semblable sont des personnes contre lesquelles nos cours de justice, malgré leur prévention dédaigneuse et leur précipitation, ne trouvent pas assez de preuves pour opérer une conviction. Il faut donc qu’un homme soit bien mal instruit ou bien dépourvu de jugement pour commettre aux hasards d’une telle protection son honneur et sa vie.

Mais je me trouvais dans un cas encore bien plus désespéré. J’étais intimement convaincu qu’un examen tel que ces institutions peuvent le faire, de-