Page:Godwin - Caleb Williams, I (trad. Pichot).djvu/6

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pirates et flibustiers, tantôt ces annales du crime connues en Angleterre sous le titre de Calendrier de Newgate, ou tout autre ouvrage bien terrible et bien lamentable. Parmi tous ces livres, il ajoute que celui qui lui fit le plus d’impression contenait les Aventures de mademoiselle de Saint-Phal, protestante française, qui, à l’époque de la Saint-Barthélémy, parcourut la France en se déguisant avec soin, et qui, à travers mille périls, échappa à ses persécuteurs. C’est faire remonter à une source toute française les aventures de Caleb Williams, d’autant plus que Godwin prétend encore que, dans son admiration pour un conte de Perrault, qu’il regardait comme un modèle du genre terrible, il s’était proposé de calquer son Falkland sur Barbe-Bleue. « Falkland, dit-il, était mon Barbe-Bleue, qui, ayant commis des crimes atroces, vit dans la crainte perpétuelle d’être dénoncé à la vengeance des hommes. Caleb Williams était sa femme ; Caleb, en effet, en dépit de ses avertissements réitérés, persiste à vouloir découvrir le secret défendu, et, après avoir réussi, tente en vain d’échapper aux conséquences de sa fatale curiosité ; semblable à la femme de Barbe-Bleue, qui s’efforce de laver la clef de la chambre sanglante et n’a pas plus tôt fait disparaître la tache de sang qu’elle la voit reparaître avec une effrayante obstination. »

Voilà, certes, une humble origine pour cette grande conception de Falkland, qui n’en est pas moins un caractère digne de la haute tragédie. Nous ne sommes, hélas ! que trop accoutumés depuis quelque temps aux effets du procédé contraire : que de nobles sujets de tragédie et de roman, qui dégénèrent en mélodrames ou en contes surannés ! — soit dit sans