Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome IV.djvu/39

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ORESTE.

Tu n’as appris que la moitié de ces horreurs.

IPHIGÉNIE.

Que craindrais-je encore ? Oreste, Electre vivent.

Oreste. 

Et ne crains-tu rien pour Clytemnestre ?

IPHIGÉNIE.

Ni l’espérance ni la crainte ne la sauveront.

ORESTE.

Aussi a-t-elle quitté le champ de l’espérance.

IPHIGÉNIE.

A-t-elle, dans la fureur de son repentir, versé elle-même son sang ?

ORESTE.

Non ! Cependant son propre sang lui a donné la mort.

IPHIGÉNIE.

Parle plus clairement, afin que je fasse trêve aux conjectures. L’incertitude agite de mille manières ses sombres ailes autour de ma tête inquiète.

ORESTE.

Ainsi les dieux m’ont choisi pour messager d’une action que je voudrais ensevelir dans les sourdes et silencieuses cavernes du royaume de la nuit ’ ! Ta bouche auguste me force à répondre contre ma volonté ; mais elle peut aussi demander un effort pénible et l’obtenir. Le jour où son père tomba, Electre cacha et sauva son frère ; Strophius, beau-frère d’Agamemnon, recueillit l’enfant avec bonté, l’éleva auprès de son propre fils, nommé Pylade, qui s’unit avec le jeune hôte par les liens de la plus tendre amitié. Et, à mesure qu’ils grandirent, grandit dans leur âme le brûlant désir de venger la mort du roi. Sans être aperçus, vêtus d’habits étrangers, ils arrivent à Mycènes, comme s’ils apportaient la triste nouvelle de la mort d’Oreste avec sa cendre. La reine les reçoit bien ; ils entrent dans la maison. Oresle se fait reconnaître d’Electre ; elle excite en lui le feu de la vengeance, que la sainte présence de sa mère avait amorti. Elle le conduit en secret au lieu où son père tomba, où


1. llûhlenrcich, dans l’édition in-8°, 1851.