Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome IV.djvu/53

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l’annoncerai au prince ce qui s’est passé. Oh ! si tu voulais te redire en ton âme comme il s’est conduit noblement avec toi depuis ton arrivée jusqu’à ce jour ! (H s’éloigne.)

SCÈNE III.

IPHIGÉNIE, seule.

Je sens que les discours de cet homme ont jeté mal à propos un trouble soudain dans mon cœur. Je tremble…. Car, de même que le flux, croissant avec des courants rapides, baigne les rochers épars sur le sable du rivage, un torrent de joie inondait mon cœur. Je tenais dans mes bras l’impossible. Un nuage semblait de nouveau m’envelopper doucement, m’enlever de la terre, et me bercer dans ce sommeil que la déesse propice répandit autour de mes tempes, quand son bras me saisit pour me sauver…. Mon cœur s’attachait tout entier à mon frère ; je n’écoutais que les conseils de son ami ; tous les efforts de mon âme tendaient à les sauver, et, comme le navigateur tourne le dos avec joie aux écueils d’une île déserte, je laissais derrière moi la Tauride. Maintenant la voix de cet homme fidèle me réveille, me rappelle que je laisserai aussi des hommes en ces lieux. L’imposture me devient doublement odieuse. Oh ! demeure en paix, mon âme. Vas-tu désormais chanceler et douter ? Faut-il que tu délaisses le sol affermi de ta solitude ! Embarquée de nouveau, tu es saisie par les vagues bondissantes ; inquiète et troublée, tu ne reconnais plus ni le monde ni toi-même.

SCÈNE IV.

IPHIGËiME, PYLADE.

PYLADE.

Où est-elle, afin que je lui annonce promptement l’heureuse nouvelle de notre délivrance !

IPHIGÉNIE.

Tu me vois ici pleine d’inquiétude, dans l’attente de la consolation certaine que tu me promets.