Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome IV.djvu/81

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Puissent les dieux te donner l’occasion et la haute faculté de distinguer nettement ce qui est glorieux de ce qu’on glorilie !

ElpÉnor. 

Que me dis-tu ? Je ne puis comprendre.

ÉVADNÉ.

Des paroles, tant fussent-elles nombreuses, n’expliqueraient pas cette prière : car c’est un vœu et une prière plus qu’une leçon. Je te la donne en ce jour pour escorte. Tu as parcouru, en jouant, les premiers sentiers, et maintenant tu entres dans le chemin plus large. Suis toujours ceux qui ont l’expérience. Je ne te serais pas utile, et ne ferais que t’égarer, si je voulais te décrire, dès l’entrée, trop exactement les lointaines contrées que tu vas parcourir. Ce que je puis te conseiller de mieux, c’est de suivre les bons conseils et de respecter l’âge.

ELPÉNOR.

Je le ferai.

ÉVADNÉ.

Demande aux dieux pour compagnons les bons et les sages. N’offense point la fortune par la folie et l’orgueil. Elle est, il est vrai, favorable aux défauts de la jeunesse, mais, avec les années, elle demande davantage.

ELPÉNOR.

Oui, j’ai en toi beaucoup de confiance, et ta maîtresse, toute sage qu’elle est, a, je le sais aussi, beaucoup de conliance en toi. Elle t’interrogeait fort souvent sur divers sujets, quand même tu ne lui répondais pas sur-le-champ.

ÉVADNÉ.

Celui qui vieillit chez les princes apprend beaucoup, apprend à taire bien des choses.

ElpÉnor.

Que je resterais volontiers auprès de toi, jusqu’au jour où je serais aussi sage qu’il faut l’être pour ne pas faillir !

ÉvadsÉ.

Quand tu te jugerais tel, il y aurait plus de danger. Un prince ne doit pas être élevé dans la solitude. Seul, on n’apprend pas à se commander à soi-même, bien moins encore à commander aux autres.