Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome IV.djvu/83

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IV.

ANTIOPE, ELPÉNOR.

ANTIOPE.

Et toi, mon fils, sois heureux dans la vie qui t’attend ! Si vivement que je t’aime, je me sépare de toi satisfaite et tranquille. J’étais déjà préparée à me séparer ainsi de mon propre fils, aie livrer, de mes tendres mains maternelles, au rigoureux devoir. Jusqu’à ce jour tu as suivi celle qui t’aimait : va maintenant, apprends à obéir pour apprendre à commander.

ElpÉnor.

Je te rends mille grâces, ô la meilleure des mères !

ANTIOPE.

Récompense ton père, qui, dans sa bienveillance pour moi, m’accorda le spectacle charmant de tes premières années, et m’associa à la douce jouissance de ta gracieuse jeunesse, ma seule consolation, quand le sort m’eut si cruellement blessée.

ELPÉNOR.

Je te plaignis souvent ; souvent mes vœux ardents regrettèrent pour toi un fils, pour moi un cousin. Quel compagnon j’aurais eu en lui !

ANTIOPE.

Il n’était guère plus âgé que toi. Les deux mères promirent en même temps aux deux frères un héritier. Vous grandissiez ; une nouvelle lumière d’espérance’éclaira l’antique maison des ancêtres et rayonna sur le vaste royaume, patrimoine commun ; chez les deux rois s’alluma un nouveau désir de vivre, de régner avec sagesse et de faire la guerre avec puissance.

ElpÉnor.

Autrefois ils menaient souvent leurs armées en campagne ; pourquoi donc plus aujourd’hui ? 11 y a longtemps que reposent les armes de mon père.

ANTIOPE.

Le jeune homme combat pour que le vieillard jouisse. Il échut alors en partage à mon époux de repousser au delà de la mer les ennemis ; il porta la dévastation dans leurs villes : une divinité

jalouse le