Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome X.djvu/30

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elle embarrasse celui dont elle a fait son idole et qui n’a pas d’abord le courage de la rudoyer, qui même s’amuse de ses étourderies ; elle en abuse toujours davantage, et, dans une nouvelle apparition qu’elle fait à Weimar-en 1811, il est enfin obligé de lui fermer sa maison.

Il n’y a rien dans tout le mouvement que Bettine a voulu produire qui mérite l’attention du public. Une seule question doit être posée : sa correspondance avec Goethe est-elle authentique ? Admettons qu’elle repose sur un fonds de vérité, mais reconnaissons en même temps que la fiction et l’exagération y abondent. Iliemer déclare que cette correspondance est un roman. C’est, croyons-nous, l’opinion reçue en Allemagne. Les fameux sonnets que Beltine se fait adresser par le poête furent écrits pour une autre. Ce trait fait juger du reste.

On s’attend bien a ne pas trouver dans les Annales le nom de Bettine ; mais celui de Napoléon n’y est pas oublié, et, quoique elles ne nous offrent que des notes rapides et décousues sur l’entrevue du conquérant et du poète, nous n’interviendrons pas entre eux et nous laisserons parler notre auteur. Les faits sont indiqués et les réflexions naissent d’elles-mêmes.

Quelques jours avant celle entrevue, Goethe avait perdu sa mère. Elle mourut le 13 septembre 1808, âgée de soixante et dix-huit ans. Elle vécut heureuse, jusqu’à ses derniers jours, dans le sentiment de sa tendresse pour un fils dont elle savourait la gloire avec délices. Il avait désiré de la posséder auprès de lui ; mais un cercle d’ancieunes connaissances, une longue habitude, l’enchaînaient à sa ville natale malgré les troubles de la guerre, au point qu’elle ne voulut pas même faire une visite à Weimar. Elle mourut comme elle avait vécu : sa sérénité ne se démentit pas un instant. Ayant reçu encore une invitation pendant sa dernière maladie, elle fit répondre : t Mme la conseillère ne pourra pas aller, Mme la conseillère s’en va mourir. » Elle ordonna elle-même son convoi ponctuellement, jusqu’à désigner les sortes de vins et de pâtisseries qu’on devrait servir aux assistants.

L’union de Goethe et de Christiane durait depuis plus de vingt ans ; Ch ristiane était fort changée, et, avec l’âge, se développa, ditun, chez elle, un genre d’intempérance toujours funeste aux charmes de la femme ; le poête ne trouvait plus chez elle ce qui peut nourrir l’amour et le préserver de l’inconstance. Au nombre des amis qu’il voyait toujours avec plaisir quand il se rendait à léna, «hait le libraire Frommann. Dans sa famille vivait une fille adop-