Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome X.djvu/317

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placé vis-à-vis de moi se défendit obstinément contre sa vive dispensatrice, et si, dans «es tiraillements, la couronne ne fut pas entièrement gâtée, l’aimable enfant n’en dut pas moins se retirer un peu confuse de ne l’avoir pas fait agréer.

Au milieu de ces plaisirs, nous aurions presque oublié le but de notre voyage, mais Beireis animait chaque fête par sa joyeuse présence. C’était un homme de moyenne taille, agile et bien fait ; on pouvait admettre ses légendes de ferrailleur ; un front bombé, d’une hauteur incroyable, en contraste avec des traits finement rassemblés, annonçait des facultés intellectuelles d’une puissance remarquable, et, en effet, dans un âge si avancé, il conservait une vive et franche activité. En compagnie, et surtout à table, il donnait à sa galanterie un tour particulier, sachant se poser sans gêne comme l’ancien adorateur des mères, et le prétendant actuel des Qlles ou des nièces. On souffrait cette folie souvent répétée, car, si personne ne prétendait à sa main, plusieurs convoyaient une part de son héritage.

Annoncés comme nous l’étions, nous fûmes l’objet de toutes ses prévenances hospitalières. Nous déclinâmes la proposition qu’il nous fit de loger chez lui, mais nous passions avec plaisir une grande partie du jour au milieu de ses curiosités. La plupart n’avaient plus que leur renommée etse trouvaient dans un déplorable état. Les automates de Vaucanson étaient absolument paralysés. Le joueur de flûte, très-pauvrement vêtu, était assis dans un vieux pavillon, mais il ne flûtait plus. Beireis nous montra le cylindre primitif, dont les simples modulations ne lui avaient pas suffi ; en revanche, il nous fit voir un second cylindre, entrepris par des facteurs d’orgues qu’il avait entretenus des années chez lui : malheureusement, ils étaient morts trop tôt et n’avaient pu achever ni mettre en place l’ouvrage, à cause de quoi, le joueur de flûte était resté muet. Le canard, déplumé, était là comme un squelette, mangeant toujours vivement son avoine, mais ne la digérant plus. Tout cela ne déconcertait nullement notre homme ; il parlait de ces vieilleries à moitié détruites avec autant d’aisance et en termes aussi forts, que si la mécanique savante n’avait rien produit dès lors de plus intéressant.

Dans une grande salle, consacrée à l’histoire naturelle, on