Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome X.djvu/410

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

sance et l’emploi qu’on en peut faire, il ne pouvait nullement, doué comme il l’était de facultés excellentes, se passer du surhumain et du supersensible. Ici encore se produisit remarquablement cette lutte que je me suis fait un devoir de décrire plus haut avec détail : car, en même temps qu’il semblait écarter tout ce qui se trouve hors des limites des connaissances générales, hors du cercle de ce qu’on peut vérifier par l’expérience, il ne pouvait s’empêcher de s’avancer ou du moins de regarder, comme par forme d’essai, au delà de la ligne si nettement tracée, et de se construire, de se représenterà sa manière un monde supérieur, un état dont toutes les forces natives de notre ûnie ne peuvent nous donner aucune idée.

Des traits épars de ses ouvrages en offrent des témoignages variés ; mais je puis surtout alléguer son Agathodémon et son Euthanasie, et même les belles et sages et cordiales paroles que naguère encore il prononça avec tant de franchise et de simplicité dans cette assemblée. Car il avait conçu une confiante affection pour notre confrérie. Il avait connu dès sa jeunesse ce que l’histoire nous a transmis sur les mystères des anciens ; avec son esprit clair et serein, il fuyait, il est vrai, ces sombres mystères, mais il ne se dissimulait point que sous ces enveloppes, élranges peut-être, des lumières supérieures avaient d’abord pénétré chez les hommes barbares et sensuels ; par des symboles mystérieux, des idées puissantes, lumineuses, s’étaient éveillées ; la toi à un Dieu qui gouverne tout avait été communiquée ; la vertu, représentée avec plus d’attraits, et l’espérance dela continuation de notre existence, purifiée des terreurs d’une, ténébreuse superstition, tout comme des exigences aussi fausses d’une voluptueuse sensualité.

Or, comme vieillard, laissé sur la terre par tant d’amis et de contemporains aimés, se sentant isolé en plus d’un sens, il se rapprocha de notre chère société. Comme il s’y présentait le cœur joyeux, comme il se trouvait régulièrement à nos assemblées, donnait son attention à nos affaires, se réjouissait de l’admission dejeunes hommes distingués, assistait à nos honorables banquets, et ne pouvait s’empêcher de nous découvrir ses pensées sur plus d’une affaire importante : nous en sommes tous témoins ; nous l’avons observé avec affection et reconnais-