Page:Goethe - Hermann et Dorothée, 1886, trad. Boré.djvu/26

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

une calèche découverte, lancée à fond de train (elle avait été fabriquée à Landau), ramenait, placé entre ses deux filles, le riche voisin, le premier négociant de l’endroit, qui se dirigeait vers sa maison nouvellement réparée. Les rues s’animèrent, car la petite ville, bien peuplée, possédait plusieurs fabriques et divers genres d’industrie.

Le couple intime, assis sous la porte cochère, s’égayait de mainte observation qu’il faisait sur les passants.

« Voici, dit enfin, l’excellente hôtesse, le pasteur qui vient de notre côté ; le pharmacien, notre voisin, l’accompagne ; ils vont nous rapporter ce qu’ils ont vu, des choses dont le spectacle n’est pas agréable. »

Tous les deux, en effet, s’approchèrent amicalement, saluèrent les époux, puis s’assirent sur les bancs de bois disposés sous la porte cochère, secouant la poussière de leurs pieds et s’éventant avec leurs mouchoirs. Après les compliments réciproques, le pharmacien, prenant le premier la parole, dit d’un ton presque maussade :

« Voilà bien, en vérité, les hommes, et l’un ressemble à l’autre. Qu’il survienne quelque malheur au prochain, tous se plaisent à l’aller regarder, bouche béante. Chacun court voir les flammes dévastatrices d’un incendie, qui s’élancent dans les airs ; la foule se hâte vers le lieu du supplice,