Page:Goethe - Les Affinités électives, Charpentier, 1844.djvu/182

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d’un éclat singulier, disparut, Ottilie se réveilla tout à coup de l’inconcevable rêverie dans laquelle elle s’était abîmée, et retourna en hâte au château. Son émotion était d’autant plus vive, que ce jour était la veille de l’anniversaire de la naissance d’Édouard, fête qu’elle s’était flattée de célébrer dans une autre disposition d’esprit, et dans une situation bien différente. Les magnifiques fleurs d’automne brillaient encore sur leurs tiges ; le tournesol levait toujours vers les cieux sa tête altière, et les marguerites aux mille couleurs s’inclinaient modestement vers la terre. Si une faible partie de ce luxe de la nature avait été cueillie, ce n’était pas pour tresser des couronnes à Édouard, mais pour servir de modèle aux peintures qui décoraient un lieu destiné à recevoir des monuments funéraires.

La tristesse et la mélancolie de cette soirée rappelaient cruellement à la jeune fille la joie bruyante que le Baron avait fait régner le jour de l’anniversaire de sa naissance à elle ; le feu d’artifice, surtout, pétillait encore à ses oreilles, et brillait à ses yeux ; illusion pleine de charmes et de désespoir, car elle était seule ! Son bras ne se reposait plus sur celui de son ami ; il ne lui restait pas même le vague espoir de retrouver tôt ou tard en lui une consolation, un appui.

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EXTRAIT DU JOURNAL D’OTTILIE.

« Il faut que je signale ici une observation de notre jeune Architecte, car elle m’a paru très-juste : Lorsque nous examinons de près la destinée de l’artiste, et même celle de l’artisan, nous reconnaissons qu’il n’est pas permis