Page:Goethe - Werther, 1845, trad. Leroux.djvu/251

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les rochers blanchissent ; je vois au loin… Mais je ne le vois pas sur la cime; ses chiens devant lui n’annoncent pas son arrivée. Faut-il que je sois seule ici !

« Mais qui sont ceux qui là-bas sont couchés sur la bruyère ?… Mon amant, mon frère !… Parlez, ô mes amis ! Ils se taisent. Que mon âme est tourmentée !… Ah ! ils sont morts ; leurs glaives sont rougis du combat. O mon frère ! mon frère ! pourquoi as-tu tué mon Salgar ? O mon Salgar, pourquoi as-tu tué mon frère ? Vous m’étiez tous les deux si chers ! Oh ! tu étais beau entre mille sur la colline ; il était terrible dans le combat. Répondez-moi, écoutez ma voix, mes bien-aimés ! Mais, hélas ! ils sont muets, muets pour toujours ; leur sein est froid comme la terre.

« Oh ! du haut du rocher de la colline, du haut de la cime de l’orageuse montagne, parlez, esprits des morts ! parlez, je ne frémirai point. Où êtes-vous allés reposer ? dans quelle caverne des montagnes dois-je vous trouver ? Je n’entends aucune faible voix ; le vent ne m’apporte point la réponse des morts.

« Je suis assise dans ma douleur ; j’attends le matin dans les larmes. Creusez le tombeau, vous les amis des morts ; mais ne le fermez pas jusqu’à ce que je vienne. Ma vie disparaît comme un songe. Pourrais-je rester en arrière ? Ici je veux demeurer avec mes amis, auprès du torrent qui sort du rocher. Lorsqu’il fait nuit sur la colline et que le vent arrive en roulant par-dessus la bruyère,