Page:Gogol - Nouvelles de Pétersbourg (extraits Le Portrait ; Le Nez), 1998.djvu/116

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Potantchikov a, il est vrai, fréquenté chez moi et recherché la main de ma fille. Cependant, malgré ses bonnes mœurs, sa sobriété, son instruction, je ne lui ai jamais donné le moindre espoir. Vous me parlez d’une histoire de nez. Si vous entendez par là que vous avez reçu un pied de nez, en d’autres termes que vous avez essuyé un refus de ma part, laissez-moi vous dire que c’est précisément le contraire. J’ai toujours été et je suis toujours prête à vous accorder la main de ma fille ; c’est le plus cher de mes désirs. Et dans cet espoir, j’ai l’honneur d’être

Votre bien dévouée,

Alexandrine Podtotchine. »

« Non, se dit Kovaliov après lecture de cette lettre, non, elle n’est pas coupable ! Impossible ! Je ne reconnais pas là le style d’une criminelle. »

L’assesseur, qui avait procédé au Caucase à plus d’une enquête, s’entendait en ces matières.

« Mais alors, comment cela est-il arrivé ? Le diable seul pourrait débrouiller l’affaire ! » s’exclama-t-il enfin en laissant retomber ses bras de désespoir.


Cependant, cette singulière aventure faisait, non sans les embellissements coutumiers, le tour de la capitale. Les esprits étaient alors tournés vers le surnaturel. Des expériences de magnétisme venaient depuis peu de passionner le public. L’histoire des chaises tournantes de la rue des Grandes-Écuries était encore présente à toutes les mémoires. Aussi ne tarda-t-on pas à prétendre que