Page:Gogol - Tarass Boulba, Hachette, 1882.djvu/129

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eussent pas encore brûlé. Cependant les Zaporogues, à pied et à cheval se mettaient en marche dans la direction des trois portes de la ville. L’un après l’autre défilaient les divers kouréni, composant l’armée. Il ne manquait que le seul kourèn de Peréiaslav ; les Cosaques qui le composaient avaient bu la veille tout ce qu’ils devaient boire en leur vie. Tel s’était réveillé garrotté dans les mains des ennemis ; tel avait passé endormi de la vie à la mort, et leur ataman’ lui-même, Khlib, s’était trouvé sans pantalon et sans vêtement supérieur au milieu du camp polonais.

On s’aperçut dans la ville du mouvement des Cosaques. Toute la population accourut sur les remparts, et un tableau animé se présenta aux yeux des Zaporogues. Les chevaliers polonais, plus richement vêtus l’un que l’autre, occupaient la muraille. Leurs casques en cuivre, surmontés de plumes blanches comme celles du cygne, étincelaient au soleil ; d’autres portaient de petits bonnets, roses ou bleus, penchés sur l’oreille, et des caftans aux manches flottantes, brodés d’or ou de soieries. Leurs sabres et leurs mousquets, qu’ils achetaient à grand prix, étaient, comme tout leur costume, chargés d’ornements. Au premier rang, se tenait plein de fierté, portant un bonnet rouge et or, le colonel de la ville de Boudjak. Plus grand et plus gros que tous les autres, il était serré dans son riche