Page:Goncourt - Germinie Lacerteux, 1889.djvu/150

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de soleil, pour une chanson de mendiant, pour un de ces riens qui passent dans l’air et détendent l’âme, elle fondait en larmes et en tendresses ; c’étaient des effusions brûlantes, un bonheur d’embrasser, comme une joie de revivre qui effaçait tout. D’autres fois, c’était pour un bobo de mademoiselle ; la vieille bonne se retrouvait aussitôt avec le sourire de son visage et la douceur de ses mains. Quelquefois, dans ces moments-là, mademoiselle lui disait : — Voyons, ma fille… tu as quelque chose… Voyons, dis ? Et Germinie répondait : — Non, mademoiselle, c’est le temps… — Le temps ! répétait mademoiselle d’un air de doute, le temps…


XXIX.


Par une soirée de mars, la mère et le fils Jupillon causaient, au coin du poêle de leur arrière-boutique.

Jupillon venait de tomber au sort. L’argent que la mère avait mis de côté pour le racheter avait été mangé par six mois de mauvaises affaires, par des crédits à des lorettes de la rue, qui avaient mis un beau matin la clef sous le paillasson de leur porte. Lui-même, en mauvaises affaires, était sous le coup d’une saisie. Dans la journée, il était allé demander à un ancien patron de lui avancer de quoi s’acheter