Page:Goncourt - Germinie Lacerteux, 1889.djvu/237

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pas trop feignant, je n’ai pas du poil dans la main pour l’ouvrage… Puis, on pourrait voir à n’être pas toujours à travailler pour les autres, à prendre une boîte de cambrousier… Toi, si tu avais quelque chose de côté, ça aiderait… Nous nous mettrions ensemble gentiment, quitte à nous faire régulariser un jour devant M. le maire… Ce n’est pas si bête, tout ça, hein ? ma grosse, n’est-ce pas ?… Et on va un peu quitter sa vieille de ce coup-là, pas vrai ! pour son vieux chéri de Gautruche ?

Germinie, qui avait écouté Gautruche, la tête avancée vers lui, le menton appuyé sur la paume de la main, se renversa dans un éclat de rire strident :

— Ah ! ah ! ah ! Tu as cru !… Et tu me dis ça comme ça !… Tu as cru que je la quitterais, elle ! mademoiselle ! Vrai, tu l’as cru ?… Tu es bête, sais-tu ! Mais tu aurais des mille et des cents, tu serais tout cousu d’or, entends-tu ? tout cousu… C’est de la farce, hein ?… Mademoiselle ? Mais tu ne sais donc pas, je ne t’ai pas dit… Ah ! je voudrais bien qu’elle meure, et que ces mains-là ne soient pas là pour lui fermer les yeux ! Il faudrait voir !… Voyons, la vraiment, tu l’as cru ?

— Dame ! je m’étais figuré… De la façon que tu étais avec moi… Je croyais que tu tenais plus à moi que ça… enfin que tu m’aimais… fit le peintre, démonté par l’ironie terrible et sifflante des paroles de Germinie.

— Ah ! tu croyais encore ça ; que je t’aimais ! Et, comme si tout à coup elle arrachait du fond de