Page:Goncourt - Germinie Lacerteux, 1889.djvu/258

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haut… et je crains bien qu’il ne soit infiltré dans toute son étendue… C’est une femme perdue… Elle peut vivre encore six semaines, deux mois tout au plus…

— Ah ! Seigneur, dit Mlle de Varandeuil, mais tout ce que j’ai aimé y passera donc avant moi ! Je m’en irai donc après tout le monde, moi, dites donc ?…

— Avez-vous songé à la mettre quelque part, mademoiselle, dit le médecin après un instant de silence… Vous ne pouvez pas la garder… C’est pour vous une trop grande gêne… une douleur de l’avoir là, reprit le médecin à un mouvement de mademoiselle.

— Non, monsieur, non, je n’y ai pas pensé… Ah ! oui, que je la fasse partir !… Mais vous avez bien vu, monsieur : ce n’est pas une bonne, ce n’est pas une domestique pour moi, cette fille-là : c’est comme la famille que je n’ai pas eue !… Qu’est-ce que vous voulez que je lui dise : Va-t’en, à présent ! Ah ! c’est la première fois que je souffre tant de n’être pas riche, d’avoir un appartement de quatre sous comme j’en ai un… Pour lui en parler, moi, mais c’est impossible !… Et puis où irait-elle ? Chez Dubois ?… Ah ! bien oui, chez Dubois !… Elle y a été voir la bonne que j’avais avant elle et qui y est morte… Autant la tuer !… L’hôpital, alors ?… Non, pas là, je ne veux pas qu’elle meure là !

— Mon dieu, mademoiselle, elle y serait cent fois mieux qu’ici… Je la ferais entrer à Lariboi-