Page:Goncourt - Journal, t1, 1891.djvu/371

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yeux tout caves et au fond une petite lueur. Et il tremble ce pauvre vieux, comme un vieil arbre mort, fouetté par un vent d’hiver. Il a tendu son poignet noueux où il y a une grosse excroissance.

— Vous toussez ? lui dit l’interne.

— Oui, Monsieur ! beaucoup ! — a-t-il répondu d’une voix douce, éteinte, dolente et humble, — mais c’est mon poignet qui me fait mal !

— Nous ne pouvons pas vous recevoir. Il faut aller au Parvis Notre-Dame. »

Le vieillard ne disait rien et regardait vaguement l’interne.

— « Et demandez la médecine et pas la chirurgie, lui répéta l’interne le voyant rester immobile.

— Mais c’est là que j’ai mal, reprit doucement le vieillard, en montrant son poignet.

— On vous guérira ça, en guérissant votre toux.

— Au Parvis Notre-Dame, » lui cria, d’une voix où la brutalité s’attendrissait, le concierge, un gros bonhomme à moustaches d’ancien soldat.

On voyait la neige tomber à flocons par la fenêtre. Le vieillard s’éloigna sans un mot avec son chapeau à la main. « Pauvre diable ! quel temps ! c’est loin !… il n’en a peut-être pas pour cinq jours ! » fit le concierge.

Et l’interne nous dit : « Si je l’avais reçu, Velpeau l’aurait renvoyé demain. C’est ce que nous appelons en terme d’hôpital une patraque. Oui, il y a comme cela des moments durs… mais si nous recevions tous les phtisiques… Paris est une ville qui use