Page:Goncourt - Journal, t3, 1888.djvu/134

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ment artiste de Rome, qui ne fait que des fleurs et pas de légumes ?

Je suis frappé combien le caractère du Français se dénationalise à l’étranger, et combien vite et naturellement le pays qu’il habite, déteint sur lui et jusqu’au fond de son être. En France l’étranger se frotte à la France ; il ne s’y noie jamais.

Tout ce qui est beau en Italie : la femme, le ciel, le pays, est crûment, brutalement, matériellement beau. La beauté de la femme est la beauté d’un bel animal. L’horizon est solide. Le paysage est sans vapeur et sans rêve.

L’au-delà nuageux de toutes les choses du Nord n’existe pas ici.

4 mai. — La Transfiguration de Raphaël. La plus désagréable impression de papier mal peint, que puisse donner la peinture à l’œil d’un peintre coloriste. Impossible de voir — quand on voit — un désaccord, une discorde plus criarde, de tons vilainement bleus, jaunes, rouges et verts — un vert surtout, un vert de serge abominable ; et tous ces tons associés dans des contrariétés hurlantes, relevées de lumières zinguées toujours en dehors de la tonalité de l’étoffe, et éclairant du violet avec