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destructeur de poisson comme lui, et tous les lièvres d’un canton, il aurait pu leur donner un nom.

22 septembre. — Nous allons aujourd’hui voir Feydeau. Il a été transporté au Parc-aux-Princes.

Nous le trouvons dans une grande maison, au milieu du désordre d’un déménagement. Il y a des cadres, des potiches, des tapis, des soieries voyantes, traînant dans les escaliers et se répandant sur la pelouse. Des voitures versent dans le jardin des meubles et des plantes exotiques.

Il est devant une fenêtre fermée, dans la pose raide et ankylosée des hémiplégiques, une couverture de voyage sur les genoux, et assis devant une table où est posé devant lui un volume des Contes de Voltaire. Il a la parole nerveuse qui se presse et sort par saccades, et une espèce d’inquiétude générale qui le fait appeler, à tout moment, son fils, qu’il craint de voir écraser par les voitures. Il parle de sa maladie, de ses médecins, de sa tête qu’on électrise, d’un grand mal de gorge, que rendent encore plus violent les éclats de voix que lui font faire son diable de bel enfant, et sa turbulente et vivace et criarde petite fille, qui a l’œil tout noir d’un pochon reçu de son frère.

— Qui n’a lu les conversations de Napoléon dans les