Page:Goncourt - Journal, t4, 1892.djvu/102

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
 Les corrections sont expliquées en page de discussion

pour Paris, qui, comme aux beaux jours du lac, a des calèches, des landaus arrêtés autour de la butte, et dont les femmes se mêlent aux mobiles, et se pressent le plus près du bruit formidable. Aujourd’hui, parmi les spectateurs, ce sont Jules Ferry, Rochefort qui parle et rit fébrilement, Pelletan, dont la tête de philosophe antique s’accommode mal du képi.

Le canon tire six coups, puis le commandant enlève de son trépied le petit instrument de cuivre à prendre les hauteurs, le met précieusement dans une boîte de fer-blanc, le fourre dans sa poche et s’en va, tandis que sur la pièce s’assied un jeune artilleur, un blond à la figure féminine, empreint de ce quelque chose d’héroïque que le peintre Gros donne à ses figures militaires, et qui, le bonnet de police de travers sur la tête, une ceinture algérienne aux rayures éclatantes lui serrant les reins, la cartouchière au ventre, tout débraillé, et charmant de désordre pittoresque, se repose de la fatigue de cet exercice de mort.

La représentation est finie, le monde se disperse.

La conversation chez Brébant, ce soir, va de « l’inconsistance politique » de Gambetta à l’homme blond, à cette race, venue dans les temps les plus anciens, de la Baltique, et éparpillée en France, en Espagne, en Afrique, et que ni les latitudes, les mélanges avec les races brunes, n’ont modifiée, n’ont brunie.

Puis ce qu’on mange d’anormal, fait raconter à chacun ce qu’il a mangé d’extraordinaire, et Charles Edmond nous conte avoir goûté du fameux mam-